Accueil > Histoire et mémoires > 3- La guerre d’Algérie 1954 1962 (Grands évènements (...) > 3.4 Les Victimes du terrorisme > 3.42 Le Massacre des Harkis et leurs Familles
Michèle LAUMET-Le Massacre des Harkis
D’autres sont faits prisonniers et enfermés dans des camps (5), dans lesquels la Croix Rouge recensera, en 1965,
13 500 personnes. Certains seront employés à des taches dangereuses telles le déminage, à mains nues, avec une jambe coupée préventivement. D’autres enfin sont enlevés : ce sont ainsi des milliers de harkis et de pieds-noirs qui disparaissent dès après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, puis au cours des deux principales vagues de répression qui interviennent en été et en automne 1962, et de celles qui interviendront plus tard entre 1963 et 1966.
Sans que les autorités françaises pourtant souvent informées des lieux de leur détention ne s’en inquiètent, et donnent même des ordres pour qu’aucun secours ne leur soit apporté (6), et pour que soient sanctionnés ceux des militaires, souvent anciens responsables de SAS, qui de leur propre initiative, achemineront leurs hommes et leurs familles vers la métropole et vers le salut (7).
Et pour que soient chassés des bateaux les harkis qui auront embarqué clandestinement, et renvoyés en l’Algérie ceux qui seront parvenus à rejoindre clandestinement la France... (8)
L’AMPLEUR DES MASSACRES : 150 000 VICTIMES
Les chiffres peuvent toujours donner lieu à controverse. Il est cependant possible d’avancer le nombre de 150 000 victimes, en s’appuyant sur différentes estimations rappelées notamment par Abd-El-Azziz Meliani, (9) et par Mohand Hamoumou (4) : celle du service historique des armées qui, dans une note officielle en 1974, estime à environ 150 000 le nombre des harkis disparus ou assassinés ; celle du chef du 2 ème bureau à Alger qui retient également ce chiffre de 150 000 ; celle de monsieur Robert, sous-préfet d’Akbou, qui dans le compte-rendu officiel où il relate les faits survenus dans son arrondissement après le cessez-le-feu, fait état de 2000 victimes en moyenne par arrondissement, soit 150 000 environ pour les 72 arrondissements algériens (3) ; celle de l’historien Guy Pervillé qui situe ce chiffre entre 30 000 et 150 000 ; celle d’Anne Heinis qui, dans un mémoire de 1977 sur l’insertion des français-musulmans (10) situe également ce chiffre entre 30 000 et 150 000 ; celle enfin d’André Santini Secrétaire d’Etat aux Rapatriés en 1986-1988 qui, pour les harkis et les pieds-noirs massacrés ou disparus au moment de l’indépendance de l’Algérie, donne les chiffres de 150 000 et 10 000.
Dans un rapport officiel de mai 1962 le contrôleur général monsieur de Saint-Salvy a pu écrire : "les crimes de guerre commis en Algérie depuis le 19 mars 1962 sont sans précédent depuis la dernière guerre mondiale, dépassant tout ce qui avait pu être constaté en Asie ou en Afrique noire" (10). De ces crimes de guerre, l’Etat français s’est rendu coupable de complicité par sa passivité volontaire, alors qu’il connaissait parfaitement la situation et qu’il disposait encore des moyens militaires suffisants en Algérie pour protéger et secourir ses ressortissants.
Michèle Laumet
(5) Témoignages concernant les camps de prisonniers et les enlèvements
Abd-El-Azziz Meliani "La France honteuse. Le drame des harkis"
Editions Perrin
(6) Circulaire de Louis Joxe
notamment dans"Les Archives inédites de la politique algérienne 1958-1962"
Maurice Faivre Editions l’Harmattan
(7) Directive du colonel Buis
notamment dans "Les Archives inédites de la politique algérienne 1958-1962"
Maurice Faivre Editions l’Harmattan
(8) Voir document joint « La responsabilité de l’Etat français »
(9) Abd-El-Azziz Meliani "La France honteuse. Le drame des harkis"
Editions Perrin
(10) Anne Heinis " L’insertion des français-musulmans "
Montpellier III thèse de troisième cycle 1977
(11) Rapport officiel de mai 1962 du contrôleur général Monsieur de Saint-Salvy
Abd-El-Azziz Meliani "La France honteuse. Le drame des harkis"
Editions Perrin