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Le Bachaga Boualem le 5 juin 1962 à l’Assemblée Nationale
EXTRAITS DU DISCOURS DU BAGHAGA BOUALAM A L’ASSEMBLEE NATIONALE LE 5 JUIN 1962
Mesdames Messieurs depuis 18 ans ma place était parmi les miens en Algérie. Pendant ce temps, vous arrêtiez notre destin. Je reviens aujourd’hui vous demander : qu’avez vous fait de nous ?
J’ai servi la France, après mon père pendant 56 ans. J’ai donné au pays un de mes fils. J’ai été loyal jusqu’au bout. J’ai engagé tous les miens. (...)
Nous avions choisi, nous nous étions déterminés et vous nous exterminez. Le choix était alors simple : ou nous laisser égorger ou fuir vers la métropole pour sauver nos enfants.(...)
Nous laissions notre sol natal, mais aussi combien d’hommes qui s’étaient battus avec nous.(...)
C’est au nom de ces hommes, de ces femmes, de ces enfants que je veux vous parler.
Ces hommes qui depuis 7 ans sont en Algérie l’instrument de la France, l’instrument vivant, l’instrument de chair, ces hommes sans lesquels aucun succès de la France n’aurait été possible, la France et son chef ont eu pour politique de les compromettre de façon irrévocable. Ils constituaient récemment encore, la moitié des forces armées françaises. (...)
On leur avait juré pour toujours et à la face du monde la fraternité. Rappelez vous ces hommes, ils n’étaient pas, ils ne sont pas un mythe. Vous les avez vus, tout le peuple de Paris les a vus, les a acclamés, portés en triomphe.
Ce fameux 14 juillet 1958, sept mille d’entre eux, les plus valeureux, venus de leurs villages et de leurs villes, malgré les menaces, drapeaux en tête avec toutes leurs décorations, avaient remonté les Champs-Elysées devant le chef de l’Etat.
Ces hommes, vous les avez appelés vos frères, vos compatriotes. Vous leur avez demandé, tout le pays leur a demandé de poursuivre le combat jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’à la victoire, car celle-ci n’était possible que grâce à eux, grâce à leur sacrifice.
Ils ont répondu, ils se sont battus. Ils ont cru qu’ils avaient gagné. Beaucoup sont morts. Aujourd’hui dans toutes les villes et les villages d’Algérie, terrés et angoissés, ceux qui demeurent attendent que vous décidiez de leur sort. Oui de leur sort et de celui de leur famille, car c’est pour eux une question de vie ou de mort.
Depuis les accords d’Evian, le silence est tombé sur ces soldats d’hier, comme si leur existence même était un remords ou peut-être une gêne pour mener à bien une politique qui est, j’aurai le courage de le dire, une politique d’abandon. (...)
Voilà que soudain, depuis quelques semaines on se remet à parler d’eux. Serait-ce l’annonce par le gouvernement d’un vaste plan de regroupement en Algérie, de transport en métropole et de réinstallation ? Non, il ne s’agit pas de cela, mais de toute autre chose. Il s’agit de ceux que leurs officiers ont refusé d’abandonner.
Ecoutez les appels de ces officiers, ils sont tous semblables : "aidez nous à sauver vingt, cinquante, cent familles. Procurez nous du travail, procurez nous des logements".