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Témoignages sur le massacre des Harkis
- LES CAMPS, p2
- ENLEVEMENTS, p3
Récit recueilli le 10 août 1962, d’un sergent chef d’un régiment d’infanterie en garnison à l’A…, près d’Alger :
« Le régiment rentre en France dans un mois environ. Comme nous ne faisons rien, même pas protéger les gens menacés, cela vaut mieux pour tous.
Je commandais en second un commando de chasse dans l’Algérois. Mes quarante musulmans ont été pris par les rebelles, dans les premiers jours de juillet. Ils n’ont pas été tués tout de suite. Je crois savoir que certains sont encore vivants.
Ils sont au camp de Taourtatsine, dans l’Atlas blidéen. A notre connaissance, c’est le camp le plus important de la région. Il y a peut être plusieurs centaines de prisonniers. Parmi eux, des Européens, femmes et enfants. Les rebelles les torturent peu à peu : on coupe un bras, le nez, on fait des plaies qu’on sale, etc. On s’en sert aussi, comme ils disent, de ‘‘filles de joie‘‘, notamment les Européens. Quand leur état est trop lamentable et qu’ils ne peuvent plus servir à rien, on les tue.
Il n’est pas question d’émettre l’idée d’aller les délivrer, ce qui serait pourtant bien simple. Les cadres sont dégoûtés d’eux-mêmes et de ce qu’on les oblige à accepter.
Pour vous montrer où on en est, la wilaya 4, ou au moins certains de ses secteurs, dont celui de mon régiment, ‘‘interdisent’’ aux militaires français de porter les décorations acquises en Algérie, c’est à dire les citations sur la croix de la valeur militaire et la barrette ‘‘Algérie ’’ sur la commémorative. De très nombreux camarades, et officiers ‘‘obéissent ’’ à cet ordre.
Quand je dis qu’on ne fait rien, c’est si vrai qu’on n’intervient même plus aux commissions mixtes du cessez-le-feu pour obtenir des libérations de Français, Européens ou musulmans que nous connaissons et dont nous savons où ils sont prisonniers. Si, dans une unité, nous demandons à agir, nous sommes sanctionnés ou mutés. De même quand il y a eu, en juillet, à Blida, Zeralda et d’autres points que je n’ai pu contrôler, des manifestations de civils musulmans avec drapeau français et criant ‘‘Algérie française’’, l’A.L.N a tiré dans le tas et nous n’avons pas bougé. »