Comité de liaison (CLAN-R)

Jean MONNERET : Que s’est-il passé le 5 Juillet 1962 à Oran ?

samedi 26 février 2011

Le 3 juillet, l’Algérie était devenue indépendante. Le 5 juillet, des foules algériennes envahirent les grandes villes et des manifestations de liesse se déroulèrent. A Oran, elles survinrent dans un contexte particulier. La ville avait été un fief de l’OAS et un intense climat de guerre civile y avait régné.

Or ce jour là, une masse de gens descendit des quartiers musulmans vers le centre de la ville. Cet endroit était habité par des Européens, et l’exode des semaines précédentes ne l’avait pas complètement vidé. Nombreux étaient les Pieds-Noirs qui y résidaient encore et y travaillaient. Ils avaient suivi les multiples appels à rester qui émanaient, tant des autorités françaises que du FLN.

Le Haut Commissaire en Algérie, Christian Fouchet avait estimé que la situation redevenait normale dans l’ensemble de l’Oranie.
D’innombrables témoins oranais rappellent que les jours précédents, des voitures de l’Armée française, équipées de haut-parleurs, sillonnaient les rues en recommandant aux habitants de rester, car tout se passerait bien.

Compte tenu de la prévalence des commandos OAS à Oran dans les semaines précédentes, on pouvait, là plus qu’ailleurs craindre les représailles. Le FLN d’Oran appelait à la réconciliation. Il avait même créé sous son égide, une Commission des Réconciliations regroupant des personnalités de toutes les communautés. La commission avait organisé un rassemblement le 30 devant l’Hôtel de Ville. La situation dans cette ville et son évolution prenaient valeur de test . Irait-on vers la réconciliation ou vers de nouveaux affrontements ? La réponse fut tragique autant que sanglante.

Le 5 Juillet est la date anniversaire du débarquement Français en Algérie. Le FLN voulait marquer, ce jour là, l’effacement symbolique de 132 ans de présence française. Dès sept heures, d’immenses cortèges s’organisèrent et commencèrent à gagner le centre d’Oran. Tous les témoins évoquent un climat d’excitation croissant. Vers onze heures trente, les manifestants semblaient attendre une prise de parole ou une démarche symbolique.

Il semblerait que des militaires du FLN s’apprêtaient à hisser leur drapeau sur la façade de l’Hôtel de Ville. Le service d’ordre algérien se bornait à de minces cordons d’ATO (1) (policiers sélectionnés par le FLN) et de soldats de l’ALN locale.

A 11H30 une fusillade éclata. Était-elle le fait de militaires français en faction sur la place et qui ripostèrent à des tirs de musulmans ? Était-elle le fait de commandos OAS comme l’ont prétendu certains ? Était-elle le fait de musulmans se heurtant à d’autres musulmans, comme quelques témoignages l’affirment ? Aucune réponse convaincante à ces différentes questions n’est possible et ne le sera sans doute jamais.

Cependant pour les musulmans qui sont là, il n’y a aucun doute, c’est l’OAS qui a tiré sur la foule. Dès lors, une soif de vengeance la parcourt. Une chasse à l’Européen se déclenche dans le centre-ville.(2)


(1) ATO : Auxiliaires Temporaires Occasionnels. Policiers algériens remplaçant les policiers français. A Alger ils furent formés en moins de quinze jours

(2) L’objectivité commande cependant de signaler que des patrouilles ont parfois sauvé des Européens, mais ce fut exceptionnel.


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