N° 1637- ASSEMBLÉE NATIONALE CONSTITUTION DU 4...
N° 1637
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DOUZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 juin 2004.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
tendant à la création d’une commission d’enquête
sur les responsabilités dans le massacre
de nombreuses victimes civiles, rapatriées et harkis
après la date officielle du cessez-le-feu
de la guerre en Algérie,
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales,
à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus
par les articles 30 et 31 du Règlement.)
PRÉSENTÉE
par MM. Kléber MESQUIDA, Jean-Paul BACQUET, Jacques BASCOU, Gérard BAPT, Alain NÉRI, Jacques FLOCH, Michel LIEBGOTT, Patrick BLOCHE, Daniel BOISSERIE, Mme Hélène MIGNON, M. Jean-Marc AYRAULT, Mmes Patricia ADAM, Sylvie ANDRIEUX, MM. Jean-Marie AUBRON, Jean-Pierre BALLIGAND, Claude BARTOLONE, Christian BATAILLE, Jean-Claude BATEUX, Jean-Claude BEAUCHAUD, Jean-Louis BIANCO, Serge BLISKO, Jean-Claude BOIS, Pierre BOURGUIGNON, Jean-Paul CHANTEGUET, Mmes Marie-Françoise CLERGEAU, Claude DARCIAUX, M. Michel DASSEUX, Mme Martine DAVID, MM. Jean DELOBEL, Bernard DEROSIER, François DOSÉ, Julien DRAY, Tony DREYFUS, Pierre DUCOUT, Jean-Pierre DUFAU, Jean-Louis DUMONT, Jean-Paul DUPRÉ, Mme Odette DURIEZ, MM. Albert FACON, Pierre FORGUES, Michel FRANÇAIX, Jean GAUBERT, Mmes Nathalie GAUTIER, Catherine GÉNISSON, MM. Joël GIRAUD, Jean GLAVANY, Alain GOURIOU, David HABIB, Mme Françoise IMBERT, MM. Serge JANQUIN, Jean-Pierre KUCHEIDA, Jean LAUNAY, Mme Marylise LEBRANCHU, MM. Jean-Yves LE DÉAUT, Jean-Yves LE DRIAN, Jean LE GARREC, Jean-Marie LE GUEN, Bruno LE ROUX, Patrick LEMASLE, Guy LENGAGNE, Mme Annick LEPETIT, M. Jean-Claude LEROY, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. François LONCLE, Victorin LUREL, Bernard MADRELLE, Christophe MASSE, Didier MIGAUD, Arnaud MONTEBOURG, Jean-Claude PEREZ, Mme Geneviève PERRIN-GAILLARD, M. Simon RENUCCI, Mme Chantal ROBIN-RODRIGO, MM. Bernard ROMAN, Patrick ROY, Mme Odile SAUGUES, MM. Daniel VAILLANT, Michel VERGNIER, Alain VIDALIES, Jean-Claude VIOLLET
Députés.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Il aura fallu attendre la loi du 18 octobre 1999 pour que la représentation nationale reconnaisse la guerre d’Algérie en tant que telle. Cette guerre qui, jusqu’alors, n’avait jamais voulu dire son nom.
1954-1962 : huit années de guerre sanglante, un véritable drame qui a laissé sur des millions de français des cicatrices ineffaçables.
Au cours de cette guerre, mais aussi après cet épisode douloureux, chacun de nous a réagi selon ses opinions politiques, selon ses origines sociales, selon ses engagements philosophiques, selon ses attaches matérielles ou affectives.
42 ans après, sans y mettre de passion, il est indispensable d’avoir une vision objective de l’histoire. En quatre décennies, le temps a fait son œuvre pacificatrice et il faut regarder en face toutes les vérités, les dire ou les raconter sans rien masquer car la vérité appartient à l’histoire. La vérité pour mieux comprendre les violences, le désarroi, la tristesse, mais aussi les blessures, les douleurs et les conséquences de cet exode forcé.
Les historiens s’interrogent pour savoir si la guerre d’Algérie a éclaté le 1er novembre 1954 à 1 h 15 du matin alors que plusieurs attentats faisaient les premiers morts de cette Toussaint Rouge ? Ou si c’était la résurgence du soulèvement de mai 1945, rapidement étouffé dans l’œuf par une forte répression, ou simplement la fin d’un système colonial ?
Le Général de Gaulle déclamait en 1958 : « Tous Français, de Dunkerque à Tamanrasset » slogan lancé à cette foule du 13 mai 1958 pour le remercier de lui avoir permis de revenir au pouvoir... Le chef de la France libre, l’auteur de l’appel du 18 juin 1940 avait alors redonné confiance à l’armée, aux soldats du contingent, et au peuple d’Algérie. Français et Musulmans, au coude à coude, formant des convois en liesse, plébiscitaient De Gaulle. Ces descendants des Phéniciens, des Byzantins, des arabes, des berbères, des turcs, mais aussi de Français « transportés » de 1851, de Pieds Noirs, d’émigrés espagnols, italiens, maltais, scandaient le nom du Général mais ne se doutaient pas que 4 ans après, après avoir fait couler beaucoup de sang, beaucoup trop de sang, l’épilogue se déclinerait dans la douleur, la haine et le déshonneur. Ils ont été les victimes d’une politique hésitante complètement hors de son temps, celui des peuples à disposer d’eux-mêmes.
42 ans après la fin de cette guerre que certains ressentiront comme un abandon, un reniement alors que d’autres la considéreront comme une logique de l’histoire, il est temps que la représentation nationale aborde les vérités historiques et qu’elle reconnaisse les traumatismes, les conséquences, les séquelles et les manquements que cette guerre a provoqué sur un grand nombre de leurs compatriotes.
42 ans après les Français rapatriés d’Algérie, Pieds Noirs ou harkis sont toujours dans l’attente d’une véritable et totale reconnaissance de la responsabilité de l’Etat. Ils attendent que la France reconnaisse les préjudices qu’ils ont subis ou qu’elle leur a laissé subir sans garantir leur protection et que ces spoliations soient réparées. 42 ans après, au-delà d’une disposition législative qui doit définitivement et solennellement reconnaître les responsabilités de la France dans le tragique et sanglant abandon de cette population française de toutes confessions, l’Etat français doit faire un travail de mémoire et vérité sur les événements.
Les accords d’Evian signés le 18 mars 1962 imposaient un cessez-le-feu. Et pourtant, combien de sang a encore coulé après cette date !
Il faut aussi évoquer le sort des harkis : pire que l’abandon, la France a mené une politique d’entrave au sauvetage des harkis. C’est ainsi que, parmi les ordres donnés en ce sens, le télégramme du 16 mai 1962 émanant du Ministre des armées, Pierre Messmer demande des sanctions contre les officiers qui avaient désobéi mais agi dans l’honneur et qui étaient à l’origine du rapatriement des harkis dont l’installation en métropole avait été interdite.
150 000 d’entre eux désarmés et sans protection furent arrêtés par l’armée algérienne, condamnés aux travaux forcés au mieux, ou exécutés. Les historiens estiment à 70 000, certainement plus, le nombre de victimes, souvent tuées dans des conditions horribles.
Pour ceux qui purent se faire rapatrier, la France les a parqués dans des camps avec fils de fer barbelés et régime disciplinaire. Pour ces Français, le devoir de réparation s’impose en raison du sang versé.
La France doit affronter son passé et permettre, 42 ans après, à de nombreuses familles de victimes de faire leur travail de deuil quelles que soient leurs origines.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Article unique
En application des articles 140 et suivants du Règlement de l’Assemblée nationale, est créée une commission d’enquête de trente membres sur les responsabilités dans le massacre de nombreuses victimes civiles, rapatriées et harkis après la date officielle du cessez-le-feu de la guerre en Algérie.
Prix de vente : 0,75 €
ISBN : 2-11-118393-8
ISSN : 1240 - 8468
En vente au Kiosque de l’Assemblée nationale
4, rue Aristide Briand - 75007 Paris - Tél : 01 40 63 61 21
N° 1637 - Proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur les responsabilités dans le massacre de nombreuses victimes civiles, rapatriées et harkis après la date officielle du cessez-le-feu de la guerre en Algérie (M. Kléber Mesquida)
1 () Ce groupe est composé de : Mmes Patricia Adam, Sylvie Andrieux, MM. Jean-Marie Aubron, Jean-Marc Ayrault, Jean-Paul Bacquet, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, Claude Bartolone, Jacques Bascou, Christian Bataille, Jean-Claude Bateux, Jean-Claude Beauchaud, Eric Besson, Jean-Louis Bianco, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Patrick Bloche, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Maxime Bono, Augustin Bonrepaux, Jean-Michel Boucheron, Pierre Bourguignon, Mme Danielle Bousquet, MM. François Brottes, Jean-Christophe Cambadélis, Thierry Carcenac, Christophe Caresche, Mme Martine Carrillon-Couvreur, MM. Laurent Cathala, Jean-Paul Chanteguet, Michel Charzat, Alain Claeys, Mme Marie-Françoise Clergeau, MM. Gilles Cocquempot, Pierre Cohen, Mme Claude Darciaux, M. Michel Dasseux, Mme Martine David, MM. Marcel Dehoux, Michel Delebarre, Jean Delobel, Bernard Derosier, Michel Destot, Marc Dolez, François Dosé, René Dosière, Julien Dray, Tony Dreyfus, Pierre Ducout, Jean-Pierre Dufau, Jean-Louis Dumont, Jean-Paul Dupré, Yves Durand, Mme Odette Duriez, MM. Henri Emmanuelli, Claude Evin, Laurent Fabius, Albert Facon, Jacques Floch, Pierre Forgues, Michel Françaix, Jean Gaubert, Mmes Nathalie Gautier, Catherine Génisson, MM. Jean Glavany, Gaëtan Gorce, Alain Gouriou, Mmes Elisabeth Guigou, Paulette Guinchard-Kunstler, M. David Habib, Mme Danièle Hoffman-Rispal, MM. François Hollande, Jean-Louis Idiart, Mme Françoise Imbert, MM. Serge Janquin, Armand Jung, Jean-Pierre Kucheida, Mme Conchita Lacuey, MM. Jérôme Lambert, François Lamy, Jack Lang, Jean Launay, Jean-Yves Le Bouillonnec, Mme Marylise Lebranchu, MM. Gilbert Le Bris, Jean-Yves Le Déaut, Jean-Yves Le Drian, Michel Lefait, Jean Le Garrec, Jean-Marie Le Guen, Patrick Lemasle, Guy Lengagne, Mme Annick Lepetit, MM. Bruno Le Roux, Jean-Claude Leroy, Michel Liebgott, Mme Martine Lignières-Cassou, MM. François Loncle, Victorin Lurel, Bernard Madrelle, Louis-Joseph Manscour, Philippe Martin (Gers), Christophe Masse, Didier Mathus, Kléber Mesquida, Jean Michel, Didier Migaud, Mme Hélène Mignon, MM. Arnaud Montebourg, Henri Nayrou, Alain Néri, Mme Marie-Renée Oget, MM. Michel Pajon, Christian Paul, Christophe Payet, Germinal Peiro, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Geneviève Perrin-Gaillard, MM. Jean-Jack Queyranne, Paul Quilès, Alain Rodet, Bernard Roman, René Rouquet, Patrick Roy, Mme Ségolène Royal, M. Michel Sainte-Marie, Mme Odile Saugues, MM. Henri Sicre, Dominique Strauss-Kahn, Pascal Terrasse, Philippe Tourtelier, Daniel Vaillant, André Vallini, Manuel Valls, Michel Vergnier, Alain Vidalies, Jean-Claude Viollet, Philippe Vuilque.
2 () MM. Jean-Pierre Defontaine, Paul Giacobbi, Joël Giraud, François Huwart, Simon Renucci, Mme Chantal Robin-Rodrigo, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme Christiane Taubira.
fr Parlement Propositions de loi. ?