Feraru Marcela. Guerre d’Algérie. Mémoires de femmes
La guerre d’Algérie ne fut pas qu’une affaire d’hommes, une lutte de guerriers. Les femmes y eurent une action, parfois meurtrière et le plus souvent pacificatrice, qu’elles fussent dans un camp ou dans l’autre, mais toujours, que ce soit pour le F.L.N. ou pour l’armée française, elles furent un enjeu !
Marcela Feraru, qui nous a déjà donné : "Harkis, histoire d’un abandon", signe ici une oeuvre pleine de poésie, de charme, d’émotion vraie. Ce film, nous livre des témoignages de femmes engagées dans le conflit, qui se rappellent leur difficultés, leurs espoirs et qui ne peuvent cacher leur amour de la terre algérienne et la nostalgie de leur beau pays.
Voir le générique du film ci-dessous.
Lire le commentaire du général Maurice Faivre qui a assisté à la projection en avant première qui a eu lieu à Charenton où nous avons été accueilli par le maire Jean-Marie Brétillon et son association de citoyens "Avenir de Charenton" à l’espace "Toffoli". Nous le remercions pour son accueil très sympathique et le pot de l’amitié qui a suivi.
L’association Secours de France, créée en 1961 par Clara Lanzi pour aider les officiers perdus et les harkis, a demandé à Marcela Feraru (1) de réaliser un DVD sur les femmes dans la guerre d’Algérie, avec le conseil des historiens Daniel Lefeuvre et Diane Sambron. Ce DVD a été présenté le 20 février par la mairie de Charenton.
Ce DVD émouvant est fondé sur le témoignage de femmes de toutes origines : Françaises et Juives d’Algérie, Algériennes nationalistes, filles de harkis, membres des équipes médico-sociales. Toutes ces femmes ont subi, dans leur chair et dans leur cœur, les souffrances d’une guerre meurtrière. Dans leur diversité, ces témoignages illustrent la complexité de cette guerre.
Diane Sambron montre que le statut islamique et patriarcal condamnait les musulmanes au mariage forcé (parfois à 9 ans), à la répudiation et à la polygamie. Émancipées par l’ordonnance de 1959, elles ont retrouvé leur condition inférieure dans le Code de la famille de 1984.
Les nationalistes expliquent les raisons de leur choix : la spoliation des terres, l’injustice de la colonisation et la pauvreté des indigènes, le refus de nationalité française, assimilée à une apostasie, le retard dans l’éducation des filles. 11.000 femmes se sont engagées dans la lutte pour l’indépendance, dont 18% ont supporté (difficilement) la promiscuité des maquis. Les autres ont accueilli et nourri les insurgés, et recueilli les cotisations. Quelques-unes ont déposé des bombes (Zora Driff ne le regrette pas), elles ont été arrêtées et certaines brutalisées. Toutes ont célébré l’indépendance dans la liesse. « Sortir les colons » fut un objectif réussi, mais certaines l’ont regretté : pourquoi tu pars, disent-elles à leur amie française ?
Les Européennes estiment en effet que les relations entre communautés étaient conviviales, dénuées de racisme, malgré l’inégalité des conditions matérielles. Elles aimaient leurs camarades d’école, et la fatma de la famille. Les guerres de 1914 et 1940 les ont montrées capables de diriger les employés arabes de leurs exploitations. Après avoir subi le terrorisme meurtrier de 1957, elles ont cru à la fraternisation de mai 1958,. Elles n’ont pas compris la politique d’abandon du général de Gaulle, et ont approuvé malgré ses excès la révolte de l’OAS. Les enlèvements de 1962 les ont contraintes de quitter dans le douleur un pays qu’elles adoraient.
Les représentantes de l’armée et des harkis évoquent le courage des femmes, la politique de contact et d’éducation des militaires, le dévouement des équipes médico-sociales itinérantes, la séparation des familles. On notera que la fille du général Salan révèle que son père s’est révolté en sachant qu’il n’avait pas de chances de gagner.
La fin de la guerre fut ainsi « un désastre pour tous ». Toutes ont perdu quelque chose. La nostalgérie des Pieds Noirs est bien connue ; ils n’ont plus de racines. Mais les nationalistes qui ont célébré « la naissance d’un pays » constatent que ce fut « une indépendance sans la liberté », consacrant la « domination des hommes ». Les femmes sont les vaincues de cette guerre.
Maurice Faivre, le 25
(1)Réalisatrice de Face à la Mort, les prisonniers de Ho Chi Minh et Histoire d’un abandon (des harkis)
Feraru Marcela. Guerre d’Algérie. Mémoires de femmes. DVD de 90 minutes. Secours de France. 17 euros.
Secours de France
29 rue de Sablonville
92200 NEUILLY S/S
Tél 01 46 37 55 13
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