Comité de liaison (CLAN-R)

La prise du fort de Brégançon par le capitaine François de Leusse et les commandos d’Afrique

jeudi 25 août 2011

17 août 1944

Nous sommes le 17 août 1944, il est environ 14h. Le fort nous défiait. Je m’avance jusqu’à la jetée, sans arme. J’aperçois de temps à autre des casques allemands. Je mets mes mains en porte-voix et, hurlant en allemand, je réclame un parlementaire. J’attends quelques minutes en me promenant sur la plage. La porte du fort s’ouvre et un soldat descend vers la jetée.

Je prends la parole :

« La pointe du Cap Bénat est à nous. Vos troupes reculent partout. Vous ne pouvez plus vous échapper et toute résistance est inutile. Vous auriez intérêt à capituler.

— Qui êtes- vous ?

— Un capitaine français, je fais partie des commandos d’Afrique. Mes hommes sont déployés en tirailleurs dans la forêt. Ils n’attendent que mes ordres. Capitulez sans condition. Si vous refusez, nous prendrons le fort d’assaut, nous ne ferons pas de quartier.

— Nos chefs refuseront de se rendre à des Français.

— Dans ce cas, tant pis. Dans une demi-heure, nous passerons à l’attaque »

L’Allemand repart. La situation ne prend pas une mauvaise tournure. Les pourparlers sont engagés, il faut les poursuivre…La porte s’ouvre une seconde fois. Le même parlementaire se présente. Que se passe-t-il ? Je le laisse s’approcher, il explique :

— « Capitaine, les gradés refusent de se rendre, ils ont reçu des ordres stricts : tenir jusqu’à la dernière cartouche.

— C’est bon, nous allons attaquer…

— Non capitaine, accordez-nous un délai supplémentaire. Les hommes veulent déposer les armes et capituler.

— Combien êtes-vous ?

— En tout 80.

— Eh bien ! Forcez la main à vos officiers. Ma proposition reste inchangée. Dans dix minutes nous donnons l’assaut et nous fusillerons les survivants. Les commandos ne font pas de prisonniers. »

L’Allemand fait demi-tour et part au pas de course. Une réputation de barbarie nous a précédés, tout comme une auréole d’invincibilité.
Les portes s’ouvrent une troisième fois. En rang par trois, commandant en tête, les soldats descendent comme pour une parade, ils ont l’arme à la bretelle et marchent en silence.

A ma hauteur, le commandant donne un ordre. Les soldats déposent les fusils en faisceau et reforment les rangs. Je fais signe à mon ordonnance. Elle arrive mitraillette au poing. J’observe le commandant. Il est digne mais blême.

Mais où sont donc les sous-officiers ? J’appelle le parlementaire :

— « Où sont les six sous-officiers dont vous m’avez parlé ?

— Ils sont morts, capitaine.

— Vous mentez !

— Non, mon capitaine. Le commandant s’est rangé à l’avis de ses hommes. Les sous-officiers ont refusé de se rendre, nous les avons abattus. »

François de Leusse monte jusqu’au sommet du fort, précédé du soldat allemand. Sur la terrasse, il désigne le faux cloître.

— « C’est ici capitaine. »

L’Allemand a dit vrai. Six cadavres sont allongés côte à côte. Ils ont la gorge tranchée.

Voila comment un coup de bluff nous ouvrit le fort de Brégançon, trois jours après le débarquement en Provence.

Pour nous, les commandos d’Afrique, ce n’était qu’un épisode de plus à mettre à l’actif de la libération de la France.

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(Texte d’un entretien avec M. François de Leusse, paru dans le quotidien Var-Matin République.)

Extrait de la plaquette émise par le Souvenir Français de La Londe Les Maures en hommage à Monsieur François de Leusse.

Prise du fort

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