Comité de liaison (CLAN-R)

RENE MAYER : Le Plan de Constantine

mercredi 3 mars 2010

Le 3 septembre 1958, en pleine guerre d’Algérie, le Général de Gaulle annonça, depuis la Préfecture de Constantine, le lancement d’un plan de développement économique et social de l’Algérie. C’était un plan "à la française", compatible avec l’économie de marché, semblable à ceux qui avaient été conçus par Jean Monnet puis par Pierre Massé quand, en Métropole, il avait fallu, après 1945, entreprendre la Reconstruction.

Ce type de plan s’appuie sur de nombreuses études. Il repose sur des concertations poussées entre tous les acteurs de l’économie et sur une prospective des relations intersectorielles dont il s’efforce d’effacer les goulets d’étranglement. Il désigne des objectifs, et comporte des mesures d’incitation.

Les finalités du "Plan de Constantine" étaient claires. Ce Plan visait, en quelques périodes quinquennales et malgré une démographie galopante, à porter le niveau économique, social et culturel de l’Algérie à un niveau européen. Dans le contexte de guerre civile de l’année 1958, il prenait aussi figure d’une riposte politique au FLN.

Mais ce plan n’avait pas jailli fortuitement du rocher de Constantine. Il n’était pas né de l’imagination du nouveau Président de la République. Il était le fruit de longs travaux d’étude antérieurs. La nouveauté de l’annonce faite par le Chef de l’État tenait donc moins à son contenu qu’au fait que, pour la première fois et au plus haut niveau, les objectifs de développement de l’Algérie étaient pris en considération.

La première tentative en ce sens s’était située vers la fin de la Seconde Guerre mondiale, alors qu’Alger avait été, durant près de deux années, le siège du Gouvernement provisoire de la République. L’opposition du ministère des finances et le manque d’intérêt du chef de l’État n’avaient guère laissé à cette première tentative la chance d’aboutir.....Un Conseiller d’État, Roland Maspetiol présida les travaux d’un Groupe d’études des relations financières entre la Métropole et l’Algérie.

Le "Rapport Maspetiol" fut remis au gouvernement en juin 1955. Ayant procédé à des comparaisons avec d’autres pays de taille et de développement comparables, il évaluait les investissements nécessaires. Compte tenu des efforts que l’Algérie était elle-même en état de consentir, il chiffrait la contribution qui devrait être celle de la Métropole.

Cette évaluation de la contribution métropolitaine servira d’hypothèse aux Perspectives décennales, puis au Plan de Constantine.La publication du "Rapport Maspetiol" souleva à Alger un vent de foi dans l’avenir. Présenté aux autorités début 1957, c’est lui qui fournit l’essentiel du contenu du discours présidentiel du 3 septembre 1958..............

Le Plan était ambitieux. Il visait à "transformer la condition des hommes et spécialement celle des plus déshérités". Il concernait tous les domaines : industrie lourde, industrie légère, agriculture, défense et restauration des sols (DRS), hydraulique, routes et ports, logement, enseignement, action sociale, etc.

La construction de logements y tenait une place particulière. L’exode rural et une (trop) rapide croissance démographique créaient d’énormes besoins. La construction était ainsi chargée d’être l’un des principaux moteurs de la croissance.Cette stratégie se révéla payante. En trois ans (1957-1960), le rythme des mises en chantier de logements fut multiplié par trois. .. En pleine guerre, le bâtiment entraîna alors à sa suite, dans une croissance à deux chiffres, la plupart des indicateurs économiques. Les emplois créés devaient à leur tour alimenter les ressources. Seules certaines industries légères comme celles du secteur textile, n’entrèrent pas dans ce cycle vertueux.

Dans l’enseignement, sur la même période, les effectifs d’enfants musulmans scolarisés furent multipliés par près de trois et ceux du secondaire furent majorés d’un tiers, passant de 37.500 en novembre 1957 à 49.300 en novembre 1960.

Mais le 16 septembre 1959, les déclarations du Chef de l’État affichaient un retournement de politique. La confiance des entrepreneurs s’effondra. Les capitaux tentèrent de fuir. Bientôt, les disparitions et les enlèvements de civils allaient semer la panique dans les rangs des Européens qui choisirent la valise plutôt que le cercueil.

Né trop tard, le Plan de Constantine n’avait survécu que trois ans….

René Mayer

Le Plan de Constantine
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